mardi, mars 06, 2007

Psychologie du bouc émissaire

Les travaux qui vont suivre sont des essais fictionnels du Centre de Prospective Psychologique et Politique de Hurvurd. Ils n'engagent aucunement des personnes réelles.

Le Reul de Mudrid est le club le plus riche du monde. Une usine à fric, qui attire les footballeurs en fonction de l'argent et de la notoriété qu'ils rapporteront au club. Les supporters ou les footballeurs comptent pour la galerie. L'intérêt sportif est relégué au second plan.
Ronuldo est arrivé au club après qu'il eut gagné la Coupe du Monde. Mal lui en a pris. Son immense talent lui servira certes à empiler les buts, mais surtout à vendre les maillots floqués à son effigie à la cadence de petits pains industrieux. Comme si ce n'était pas suffisant pour écoeurer le meilleur footballeur du monde, le plus grand génie que le foot ait produit depuis Pelé, Ronuldo est trop bon. Il provoque la haine. Haine des supporters et de la presse qui n'acceptent comme rendement du génie que l'impossible. Ronuldo peut réussir les plus grands exploits, ceux-ci sont catalogués comme normaux et nullement sujets d'admiration.
Ronuldo est prisonnier d'un terrible piège : ce qu'il réalise d'extraordinaire est ramené à la normalité et, dès qu'il tombe dans le normal, il suscite des polémiques. Ruul est le capitaine de l'équipe. Avant l'arrivée de Ronuldo, d'autres stars sont venues enrichir la notoriété du club : l'excellent Figu et le taiseux Zidune, deux champions de classe mondiale. Beckhum les a accompagnés, mais l'Anglais compte pour du beurre. Il ne sert sportivement (presque) à rien.
Ruul a commencé par bouder et manifester son mécontentement : d'aussi prestigieux noms n'allaient-ils pas empiéter sur sa notoriété auprès du grand public et des aficionados madrilènes, les fameux et versatiles socios, qui ne savent que trop le pouvoir discrétionnaire qu'il détiennent et dont ils abusent en toute impunité? Ruul s'est vite ravisé en se rendant compte que les recrutés étaient tous des milieux de terrain et qu'ils allaient l'aider à inscrire encre plus de buts.
Ruul se sait en perte de vitesse. Ce neuf et demi marque de moins en moins de buts à mesure que les saisons défilent. Les recrutés vont l'aider à redorer son blason. Horreur! L'Espagnol, qui est le chouchou des socios, le Madrilène pur jus, l'incarnation de la fibre nationaliste du club, voit débarquer le meilleur attaquant du monde, l'inénarrable Brésilien Ronuldo. Cela entraîne le départ de son grand ami, l'avant-centre espagnol Morientus, un bon joueur, mais qui ne fait pas le poids en comparaison du style unique de Ronuldo.
Du coup, Ruul sombre corps et biens. Il est en chute libre. Il erre sur le terrain, ne marque plus de but et sert au mieux de faire-valoir inutile au Brésilien. De rage rentrée, il sait que son président ne l'aidera pas, puisque Ronuldo marque presque un but par match et qu'il remplit les caisses. La caisse contre la casse, le coeur ne balance guère...
Il ne lui reste plus qu'à tisser sa toile et à attendre que le Brésilien connaisse des difficultés. Ruul commence par liguer les Espagnols du vestiaire, les internationaux qui symbolisent la fibre espagnole, en sa faveur et contre Ronuldo. Le Brésilien ferait trop la fête et se montrerait trop égotiste. Il ne penserait pas assez au Reul, ce club mythique qui serait plus qu'un maillot et mériterait qu'on lui consacre sa vie et son âme.
Mais les joueurs sont de pleutres pleureuses et pour le moment les résultats sont excellents. Attaquer Ronuldo n'est pas possible! Ruul patiente. Il sait qu'il saura saisir son heure. Elle arrive quand les résultats du club flanchent et que Ronuldo commence à enquiller les blessures.
Ruul en profite. Le président, saisi de mégalomanie, a vendu tous ses défenseurs et ses milieux défensifs pour collectionner les attaquants. Une politique aussi dispendieuse que vaine. Le Reul a du plomb dans l'aile. Au nom des intérêts supérieurs du club, Ruul monte au créneau et organise des campagnes de presse contre Ronuldo. Celui-ci sortirait trop et ne penserait qu'aux femmes et à l'argent. Il serait le principal responsables des résultats irréguliers du club. Peu importe que Ronuldo continue à empiler les matches et les buts extraordinaires, une frange des socios, pour qui un étranger est fatalement sujet à suspicion, emboîte le pas et siffle le prodige. Normal : Ronuldo fait plus que de l'omnre à Ruul.
Ronuldo n'a plus le choix : il est condamné à l'impossible, à l'exploit constant, au dribble virtuose sur chaque prise de balle. Il déprime, et les campagnes de calomnie, plus ou moins justes ou fausses (il mange trop, il boit, il est gros, il court les mannequins, il ne pense qu'au fric) ne contribuent pas à le rendre serein. Ruul a compris qu'il ne reviendrait plus au top niveau, mais il a trouvé le moyen de garder son pouvoir intact. Le corps révélant parfois les blessures de l'âme, Ronuldo est souvent blessé.
Il arrive à la Coupe du Monde très déprimé et le genou en compote. Il sert les dents, joue malgré tout et bat le record du monde de buts en Coupe du Monde. Les faits sont têtus : Ronuldo est le meilleur et pourtant tout le monde semble s'acharner sur lui. Les campagnes sont d'un niveau réconfortant. N'importe quelle personne qui s'aventurerait à traiter une victime lambda de gros se ferait, à son tour, traiter séance tenante d'ignoble discriminateur fasciste, raciste et antisémite par la clique des censeurs de la presse qui s'acharnent sur le cas Ronuldo!
D'ailleurs, le nouvel entraîneur de Reul de Mudrid, un Italien dénommé Cupello, l'a bien compris. Il a pris le parti de Ruul et des plus forts. Le but : faire de Ronuldo, qui n'est pas un saint, un bouc émissaire idéal. Sous-entendu : les mauvais résultats du Reul sont dus à Ronuldo. Nullement à la gestion sportive catastrophique. Un semblant d'objectivité et d'équité aurait commandé de préciser que Ronuldo était le grand responsable des moyens résultats du club et que sans lui ils auraient été bien pires...
Peu importe. Après quelques passes d'armes suintant la mauvaise foi, Ronuldo décide de se tirer avec armes et bagages. Direction : le Milun UC. Un grand club où l'on ne fera pas semblant de ne pas comprendre son talent. Un grand club où les bons footballeurs autochtones ne sont pas des starlettes jalouses et mesquines. Un grand club où l'âme historique, le mythique arrière-gauche Muldini, est ravie d'accueillir celui qu'il considère comme son meilleur adversaire, avec Murudonu. Plus qu'un compliment. Un adoubement. Ronuldo va renaître. Et pour ses supporters, ce qui compte, ce n'est ni son palmarès, ni son compte en banque, mais les nouvelles arabesques qu'il dessinera avec ses pieds. Quand Ronuldo devient le bouc émissaire du ballon, celui-ci ne tourne pas rond. Qu'on se le tienne pour dit.

2 commentaires:

Unknown a dit…


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