mardi, mars 06, 2007

Parole de sage

A en croire le (mauvais) Journal de Polac, il paraît que Luc Ferry, le philosophe-ministre mondain, celui qu'Ardisson prend pour un génie de la philosophie (quand il le dit, les yeux de Marie-Caroline Becq de Fouquière brillent de tendresse contenue), Luc Ferry le Nouveau Philosophe, à la question de savoir pourquoi il n'était pas philosophe, aurait expliqué qu'avant de devenir philosophe (penser par soi-même), il était indispensable de lire Kant pendant dix ans, puis Spinoza pendant dix autres longues années.
Vu que cette anecdote remonte à une ou deux décennies, on peut juger du résultat en lisant les brillants livres de philosophie dont Ferry a accouché après ses lectures assidues et in extenso. Je veux désigner son chef-d'oeuvre impérissable - Apprendre à vivre : Traité de philosophie à l'usage des jeunes générations. Serait-ce que la philosophie de Ferry rompe avec les anciens -ismes sus-mentionnés ? Ou se rapporterait-il au gâtisme le plus innovant ?
En tout cas, cette explication est symptomatique d'une mauvaise foi particulièrement dangereuse en ce qu'elle remplace la pensée (et la lecture) par le commentaire : avant que de penser, il faudrait commenter comme un bénédictin minutieux décortiquant les textes avec la rigueur et la précision de l'entomologiste zélé (voir Nietzsche sur ce point). On sent poindre le slogan subliminal : commentez comme un rat de bibliothèque pendant vingt à trente ans les grands textes - et vous aurez le droit de philosopher - à partir de soixante-dix ans? Je crains que l'inverse ne soit vrai : penseur ou commentateur, il faut choisir! En ajoutant que commenter n'est pas un gros mot, mais une activité noble et fort profitable (notamment aux jeunes générations, dont les relais culturels s'estompent trop souvent). Il ne s'agit nullement de dévaloriser le commentaire, mais de le replacer à sa juste valeur.
Quand Descartes fit son choix, que décida-t-il ? De se lancer dans quelques codicilles d'Aristoteles dixit de la scolastique classique ? D'opérer un savant mix de saint Thomas d'Aquin et d'Aristote? Que non! Il entreprit d'écarter les précieux enseignements dont on l'avait abreuvé, la sophistique et La Flèche pour accorder son entière confiance à ses lumières personnelles !
Kant rompit avec Wolff et Spinoza avec la synagogue pour penser par lui-même. Ce n'est pas un hasard si, dans les temps modernes, Rosset se trouva marginalisé au ban de la bonne société universitaire, à l'instar de Girard, parti s'exiler sous des cieux plus cléments. L'époque ne pardonne pas la différence quand elle est de qualité (donc originale). Pourtant, l'évidence saute aux yeux : on ne pense pas dans le sérail, sinon le sérail produirait les philosophes à la louche - avec le caviar des réceptions et les feux cathodiques de la reconnaissance immédiate à courte vue.
Ferry s'est-il brûlé aux feux de la rampe, futile papillon orné de son noeud festif et de ses bouclettes pimpantes ? Grave question : Ferry fut-il futile? En tout cas, ce double agrégé (philosophie et sciences politiques) prouve que les diplômes ne créent pas les idées, comme l'humidité les champignons, et que celles-ci ne se trouvent pas dans les choux. Une hypothèse : Ferry a imploré la cigogne Sorbonne de lui apporter un joli traité sur son toit ensoleillé. Que nenni, mon prince ! Vous serez ministre et kantien, il faudra vous en contenter! C'est déjà beaucoup, et puis, entre un compliment d'Ardisson apprécié de millions de téléspectateurs et un coup de poignard créateur asséné par un fanatique, il faut choisir. Vu ?

3 commentaires:

qualité a dit…

Salut
Un petit mot juste pour te dire que ton blog est génial.
Continue comme ça et que la force soit avec toi
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Eh bien, riche créativité et surtout une belle source d'infos, merci à vous et continuez de nous enrichir, belle journée à vous

rosi a dit…

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Félicitations! quel beau travail.

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