mardi, novembre 28, 2006

Extension du domaine de la pub

Son entrée people fut fracassante. Le premier livre se vendit comme des petits pains. Ami d'Ardisson, il parvint à compenser largement son physique ingrat par une coupe de dandy mondain et des positions très transgressives : n'oublions pas que le bonhomme fut directeur de campagne de Robert Hue et afficha, longtemps du moins, un communisme béat. On comprend la dégringolade du communisme quand on mesure la valeur de l'engagement de pareils monstres sacrés.
Si Beigbeder est communiste, alors il est aussi un grand écrivain. C'est d'ailleurs le concept auquel s'attacha ce grand fils de pub pour meubler le vide existentiel de sa longue litanie de débauches mièvres et consommées. Ne jamais oublier que Beigbeder est l'ami d'Ardisson, autre fils de pub - le plus grand celui-là. La publicité a lancé son OPA révélatrice sur la culture. Du coup, la culture se passe désormais de la télé. Beigbeder a vendu 99 Francs comme un produit marketing. Ca a marché comme sur des roulettes. Un Tropico, Coco? Depuis, il pose comme écrivain. Maudit? Il aurait du mal, le bougre! Il hante les plateaux de télé et les discothèques, sans doute pour puiser l'inspiration entre deux mondanités, à moins que ce ne soit (aussi) pour tester le pouvoir de séduction de l'estampille Vu à la télé auprès des bimbos parisiennes.
Succès garanti! Beigbeder a sorti 99 Francs comme on sort un disque de la Star Ac : en bon publicitaire, son coup de génie fut de laisser croire que ce livre était un horrible pamphlet contre le monde de la pub dont il était issu. Pauvré Frédéric! Le Rastignac raté de la com se présentait en Cosette décatie! Moi, je l'aurais bien vu en madame Bovary. Je m'ennuie, je m'ennuie... Evidemment, quand on a perdu deux heures à lire le livre, on a envie de casser la gueule à l'écrivain. Surtout si on l'a aperçu avec perplexité et effroi lors d'un spectacle avant-gardiste au Livre sur la place à Nancy. Pendant une demi-heure, il s'était entendu comme larron en foire pour partager avec le Claude François de la littérature, Yannn Moix, son goût de l'auto-dérision. Jugez plutôt : les deux larrons s'étaient échangés leur livre respectif et se moquait l'un de l'autre en répétant jusqu'à satiété qu'ils n'étaient que des génies respectifs... Puis je le retrouvai lors de l'Hyper-Show, son fugace mag sur Canal +, et je lui pardonnai aussitôt : devant son piteux échec, je compris que Beigbeder était fait pour être animateur. C'est dans la peau du commentateur décalé qu'il finira. Un publicitaire se recycle nécessairement dans le spectacle.
Un publicitaire se vend. C'est son art et sa rhétorique. Lui vendra des millions de livres. Si Beigbeder avait essayé, il aurait fait aussi de la chanson. Noah bis, pourquoi pas? Les livres de Beigbeder sont ce qu'ils sont - des nullités. Chacun le sait. Tout le monde se tait. Donc Tout le monde en parle! Beigbeder devrait un jour s'arranger pour obtenir le Goncourt devant Houellebecq. Ce serait sa manière de lui signifier combien il l'admire. En attendant, il pavoise, de nouveau sur Canal +, dans l'émission de Denisot, qui en a fait son chroniqueur littéraire. Il a raison, Denisot, c'est encore ce qu'il sait faire de mieux, Beigbeder : parler des écrivains, de cette caste dont il aurait aimé faire partie, lui qui brûle encore d'être reconnu comme un génie littéraire. Du coup, il fait la fête pour se consoler, fort du principe selon lequel on obtient dans cette vie ce que l'on paraît. Il y a comme un vice de forme chez Beigbeder. Quelque chose de fêlé malgré tout. Quand il prend une paire de claques de la part de l'inénarrable Soral, on se dit que c'est vrai, que c'est une redoutable tête à claques. Quand il se fait rembarrer par Revel sur le plateau défunt de Rive droite-Rive gauche (la seule bonne émission d'Ardisson au demeurant), on comprend à quel point cet intellectuel de haut vol est une girouette impénitente.
Beigbeder est un décadent. Le pendant de BHL en plus nihiliste. Quand BHL capitalise le vide, Beigbeder le dilapide. L'influence de la pub a laissé des traces. Il brûle, il brûle, sauf qu'à la différence du Phénix, il ne renaîtra pas de ses cendres. Beigbeder est calciné. Sa disparition coïncide avec son apparition : 99 francs, c'est trop cher pour un roman dont la fin laisse sur sa faim. N'est pas Mac Do qui veut.

3 commentaires:

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