samedi, décembre 16, 2006

Derrida & Co.

Deleuze était, de l'avis unanime, le plus intelligent de nos philosophes. De quoi redonner sa fierté à la France après le triste épisode des nouveaux philosophes, qui inauguraient, c'est vrai, de leur impayable appellation l'ère du médiatisme people.
Derrida fonda la déconstruction à partir de son génial concept de différAnce. Il y aura désormais dans l'histoire de la philosophie la déconstruction à côté de la phénoménologie et de la biologie.
Foucault révolutionna la philosophie en lui adjoignant le poids des sciences humaines. D'ailleurs, l'immense penseur politique Toni Negri, celui qui eut l'heureuse initiative de militer pour l'extrême-gauche révolutionnaire dans les années soixante-dix, n'hésita pas à le mentionner comme le plus grand des philosophes de toute l'histoire - aux côtés de Deleuze il va sans dire.
Bourdieu fut le philosophe de la sociologie, l'intellectuel engagé dans toutes les bonnes causes. Son héritage sera celui de la générosité et du combat pour la Justice.
Ces philosophes méritent sans conteste leur place auprès de Lacan, psychanalyste tout-terrain qui produisit de si fécondes intuitions sur la scène philosophique (et mathématique).
Sans hésitation, nos penseurs sont les dignes continuateurs de l'oeuvre immense de Jean-Paul Sartre. N'oublions pas d'y adjoindre Albert Camus, dont L'Homme révolté mérite l'étude au-delà de la classe de terminale : au moins jusqu'en licence. Et puis, Jacques Baudrillard, dont la maîtise de Hegel permet de faire accéder la philosophie à la clarté diaphane. Mais lui est encore vivant... Attendons quelque peu avant de célébrer notre grand homme! Paul Ricoeur mérite de figurer dans notre liste non exhaustive. Le vieux protestant n'était guère apprécié de ses pairs, mais ce n'est pas une raison de ne pas l'intégrer à l'oraison. Ah! j'oubliais Aron. Mais aussi Michel Henry. Egalement Simone de Beauvoir. Et Paul Virillio. André Glucksmann. Pascal Bruckner...
Dans la précipitation de mon enthousiasme sans borne, j'ai peur d'avoir adjoint à ma liste prestigieuse quelques noms en trop. Mille excuses. Si la justesse de mon analyse est avérée, la France de l'après-guerre aura produit le plus fécond panel de l'histoire de la philosophie. En comparaison, l'Athènes du Vème siècle ne mérite que dédain et haussement d'épaules! Rendons-nous compte : même les Américains, ces incultes, rendent hommage au génie français, qu'ils se sont empressés de célébrer, dans leur jargon inimitable, sous le terme de French Theory. Sur les campus américains, dans les départements de littérature, Derrida est une superstar, qui a produit de nombreux et brillants disciples. Des déconstructeurs à foison côtoient des deleuziens ayant trouvé dans les ouvrages de l'ami Guattari l'alternative à Freud et Hegel.
Qui a dit que les intellectuels français se portaient mal? Leur succès outre-Atlantique atteste de leur vitalité exponentielle. Il n'y a pas que Beigbeder pour s'exporter à l'étranger! Au moins, ce dernier bénéficie de l'apport de ses glorieux aînés. Tous ces penseurs ont eu l'immense mérite de prôner l'extrême-gauche non communiste. Michel Onfray l'a justement remarqué dans un ouvrage du meilleur goût, peu de temps avant la sortie de son incontestable chef-d'oeuvre, le Traité d'athéologie.
J'ai bien peur de manquer de crédibilité en mentionnant Michel Onfray. Et si je pêchais depuis le début de mon hommage ? Si l'on accepte d'envisager l'apport philosophique de Derrida & Co, on risque fort d'être désappointé. La célébration obéit à de curieux passages obligés. Pour percer en philosophie contemporaine, il semble nécessaire de rendre hommage, au moins, au glorieux trio Deleuze, Derrida, Foucault, comme s'ils allaient de pair. Une question simple pourrait être adressée à l'ensemble de ces penseurs. Non pas : quels furent vos mérites? Mais : quelles intuitions philosophiques avez-vous apporté pour entrer dans l'histoire de la philosophie ? La vraie réponse coule de source.
Deleuze eut beau osciller au fil de son parcours entre des positions nietzschéennes, spinozistes, structuralistes, proustiennes, j'en passe et des meilleures, il n'émit aucune idée originale. Sinon : laquelle? Derrida fut un épigone de Heidegger, Husserl ou Hegel. A part ça? Foucault lutta pour les droits des prisonniers ou des sexualités pestiférées. C'est bien, de cultiver sa différence.
En gros, les philosophes français de l'après-guerre sont de grands commentateurs, pas de grands penseurs. Dans un tour de passe-passe inquiétant, ils ont réussi à faire croire qu'avec du jargon et du clinquant, on parvenait à élaborer du génie. Autant dire qu'avec un peu de farine, on faisait du pain! N'est pas Bergson qui veut. Sauve qui peut! Deleuze prophétisait que l'enseignement de la philosophie à l'Université avait manqué de le détruire. Je crains qu'il ait mésestimé son diagnostic : il a été détruit!, et en compagnie de tous ses pairs, de son fan-club impayable. Par orgueil, ils sont une bande d'escrocs (le terme n'est pas trop fort s'il est pris dans une acception strictement intellectuelle) à avoir détourné le commentaire philosophique pour en faire l'essence de la philosophie. Ce n'est pas une coïncidence s'ils figurent tous au sommaire d'Impostures intellectuelles, le pamphlet qui retrace les délires pseudo-scientifiques des petits maîtres parisiens. Est-i beosin de préciser que l'accueil critique fut à la hauteur du lynchage qui interdit toute critique envers les glorieux anciens?
Derrida fut le grand ordonnateur de cette supercherie : ayant réussi à baptiser sous le vocable précieux de déconstruction le fumeux projet de déconstruire la métaphysique, il s'attira immédiatement les faveurs des devôts. Entreprise originale... Barthes applaudissait des deux mains. A ce propos, Rosset règle son compte au grand professeur dans son dernier opuscule, Fantasmagories, sur ses conceptions artistiques douteuses. Je crains fort qu'il n'y ait pas que les conceptions qui se révèlent douteuses...
Autre caractéristique de ces éminents penseurs : leur illisibilité? Loin de rappeler le jargon d'un Kant ou d'un Hegel, elle annonce le galimatias. A partir du moment où Deleuze quitte les routes balisées de l'histoire de la philosophie pour ambitionner l'oeuvre philosophique, Maurice de Gandillac, son maître, remarque qu'il s'embarque dans le délire hilarant. Sur les mille plateaux de sa pensée, en somme, l'air est devenu irrespirable...
On pourrait en dire long sur la pédanterie d'un Derrida, dont même les dédicaces sont incompréhensibles et précieuses. Ces philosophes n'ayant rien à dire n'ont rien trouvé de mieux que de verser dans la folie verbale. Sans aller jusqu'à Althusser, ils ont prouvé qu'on pouvait pousser le mimétisme jusqu'aux cimes sans tutoyer l'univers de la création. Ces excellents élèves, la plupart normaliens, oublièrent que l'agrégation était la meilleure porte de sortie pour bâtir des philosophies originales. Circulez, il n'y a rien à voir!
De l'après-guerre, je ne connais que deux philosophes de valeur : Clément Rosset et René Girard. Le premier fut méprisé par sa génération; le second s'est exilé aux Etats-Unis et se considèrent comme un anthropologue. Ni l'un, ni l'autre n'ont bénéficié de l'éclairage médiatique qu'aurait mérité leur oeuvre. Ce symptôme ne montre pas seulement la défaillance d'une génération, mais l'égarement des relais de l'information. Pour avoir pris des vessies pour des lanternes, on s'est plaint que les phares éblouissaient. Le goût est chose capricieuse et malaisée!

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Monsieur,

Ancien élève de Jacques Derrida à l'Ecole, je me permets de vous signifier le plus profond mépris qu'engendrent vos ricanements de garnement. Et d'abord, Koffi Cadjehoun, vous êtes une canaille! J'ai vérifié : vous n'avez jamais fait Normale Sup! De quel droit un non-Nomalien se permettrait-il de critiquer un agrégé-répétiteur, ami d'Althusser de surcroît? Pour qui a eu l'insigne grâce de lire la dédicace de Dissémination en Décembre 1971, je laisse le soin d'en découdre avec votre prose de pacotille : "S'écartant d'elle-même, s'y formant toute, presque sans reste, l'écriture d'un seul trait renie et reconnaît la dette. Effondrement extrême de la signature, loin du centre, voire des secrets qui s'y partagent pour disperser jusqu'à leur cendre.
Que la lettre soit forte en cette seule indirection, et de toujours pouvoir manquer l'arrive, je n'en prendrai pas prétexte pour m'absenter à la ponctualité d'une dédicace : R. Gasché, J.J. Goux, J.C. Lebensztein, J.H. Miller, d'autres, il y a là cendre, reconnaîtront, peut-être, ce qui intervient ici de leur lecture."
Que c'est beau! Que c'est génial! Je retourne à ma lecture de J.L. Nancy.

Anonyme a dit…

J'ai l'impression Koffi Cadjehoun que vous utilisez des mots dont vous n'avez aucune idée. Tout se passe comme si, croupissant dans quelque anonymat, vous aviez résolu de vomir, en une prose plutôt désagréable, n'est-ce pas ?, l'ignorance teintée de ressentiment qu'il y a sens, me semble-t-il, à vous imputer. Je vous parle comme à un ami, ce que vous faites n'est pas très bon. Abandonnez tout. Non, continuez plutôt, pourquoi pas ?
Bien sûr, vous "penserez" que je me trompe.

Cordialement
Bérédine

Unknown a dit…

Merci beaucoup pour ces merveilleux instants de lecture que vous m’avez offerts j’aimerais beaucoup que vous veniez vous visiter mon site préférer, j’en profite pour vous souhaiter une bonne journée
à très bientôt


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Anonyme a dit…

Quelle bassesse...

Julia a dit…

Merci pour ces bons moments sur votre blog. Je suis souvent au poste pour regarder (encore et toujours) ces merveilleux articles que vous partagé. Vraiment très intéressant. Bonne continuation à vous !

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